Un tiers des jeunes en souffrance psychique

Seulement la moitié des 18-24 ans estiment être en bonne santé mentale selon une étude de grande ampleur menée par l’Inserm. Bien que déclarée grande cause nationale en 2025, les outils font encore défaut comme le souligne une commission d’enquête parlementaire en cours.

«La santé mentale et psychiatrique des adolescentes s’est dégradée de façon significative depuis l’épidémie COVID.

Ce lundi, Sarah El Haïry, Haute-commissaire à l’Enfance, organise une conférence sur la santé mentale des jeunes dans le cadre d’un nouveau cycle de rencontres mensuelles intitulé « Enfance en débat », consacré aux grands enjeux de l’enfance. Intitulée « Santé mentale des jeunes : un défi collectif vers une société engagée », cette journée va mettre en relief une réalité inquiétante : selon une étude de grande ampleur menée par L’inserm, un tiers des jeunes de 18 à 24 ans déclarent être en souffrance, de l’anxiété aux troubles psychiatriques.

L’enjeu est aussi au cœur du travail d’une commission parlementaire sur la prise en charge de la santé mentale et du handicap. Le 22 septembre, son rapporteur, le député socialiste de Gironde, Sébastien Saint-Pasteur, estimait que «le compte n’y est pas», un an après que le sujet eut été érigé en « grande cause nationale» par l’ancien Premier ministre Michel Barnier.

Le handicap et la santé mentale sont « deux sujets qui se rejoignent par rapport aux délais et aux difficultés de prise en charge mais aussi dans le manque de professionnels», a déclaré le député socialiste. La Commission poursuit cette semaine ses auditions et devrait rendre publiques ses préconisations à la fin de l’année.

Ce manque de moyens publics pour répondre aux besoins des plus jeunes est illustrée par la décision du gouvernement de lancer un partenariat avec le géant américain du divertissement Disney. Cette campagne de sensibilisation à la santé mentale à destination des enfants dévoilée le 9 octobre, s’appuie sur les personnages du film Vice-Versa. Un livret d’information à destination des enfants du CP à la 6e, « Parlons santé mentale », met en page les personnages et des visuels inspirés du film d’animation à succès de Pixar, filiale de Disney. Il sera mis à disposition des enseignants partout en France dans les prochains jours, après les vacances scolaires de la Toussaint. Des affiches, un livret à destination des parents, et un spot d’information complètent le dispositif. «Plus de 40% des 18-24 ans présentent des signes de dépression», a souligné Michaël Nathan, directeur du Service d’information du gouvernement (SIG), lors d’une conférence de presse jeudi 9 octobre. Il a précisé que Disney n’avait pas été rémunéré dans le cadre du partenariat, décrit comme un outil d’information sur la santé mentale parmi d’autres. Il a rappelé que le ministère de l’Éducation nationale utilisait aussi la mini-série Adolescence, diffusée sur Netflix, sur les dangers des réseaux sociaux et des mouvements virilistes chez les adolescents. «On a là des outils qui correspondent exactement à ce qui est impactant» chez les plus jeunes, «toutes les études, tous les experts nous disent que sur ces questions (…), si on l’aborde directement en termes de (…) de message sanitaire, on n’atteint pas nos objectifs», a expliqué Thibaut de Saint Pol, délégué interministériel à la jeunesse, lors de la conférence.

Une institutrice de la Drôme confie que « sur Eduscol », outil de ressources pédagogiques pour les enseignants, «on a du matériel mais ces supports ne sont pas adaptés aux enfants actuels. Il nous manque des ressources clés en main, des supports parlants, colorés…», ajoute-t-elle, affirmant que « tout le monde utilise Vice Versa (…), la gestion des émotions, c’est un vrai sujet dans nos classes».

Elle interroge toutefois : «j’utilise La couleur des émotions d’Anna Llenas, un classique de la littérature jeunesse» en classe, «pourquoi ne promeut-on pas ce genre de livres?». Aurélie Gagnier, co-secrétaire générale du FSU-Snuipp, affirme que «le ministère ne devrait pas avoir à conclure des partenariats avec des (intermédiaires) privés pour combler ses manques, particulièrement avec des multinationales». L’enquête Talis, menée par l’OCDE auprès des enseignants et chefs d’établissements, «dit bien que les compétences socio-émotionnelles en France sont moins travaillées que dans les autres pays» car «nous manquons de formations», constate-t-elle.

Étude Mentalo

C’est la première grande étude nationale sur le bien-être mental des 11-24 ans menée par l’Inserm. Elle les questionne plusieurs fois dans l’année, afin de suivre l’évolution de leur bien-être et d’identifier les facteurs qui y sont associés. Lancée en mai 2024, elle s’achèvera en 2026.

Les filles plus touchées

Le bureau Europe de l’OMS a publié en octobre 2023 les données issues de l’enquête Health Behaviour in School-aged Children (HBSC). En France, la santé mentale s’y dégrade particulièrement à 15 ans et parmi les jeunes filles qui déclarent plus souvent que les garçons un mal-être.

Huit ados sur dix se disent en bonne santé

8 sur 10 des élèves de collège et de lycée se perçoivent en bonne santé. Un tiers des élèves interrogés se sont déclarés en excellente santé selon une étude menée par l’Inserm. Mais seuls la moitié d’entre eux ont un bon niveau de bien-être mental.

Risque de dépression

14% des collégiens et 15% des lycéens présentent un risque important de dépression. Le fait de manquer d’énergie, de se sentir découragé et d’avoir du mal à réfléchir sont les trois principaux symptômes dépressifs déclarés par les adolescents.

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